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Hommage à Christiane CELLIER : Une pionnière de la lutte contre l'insécurité routière

Le 31 décembre dernier s’est éteinte Christiane Cellier, présidente fondatrice de la fondation Anne Cellier contre l’insécurité routière. Si cette dernière, en accord avec sa famille, avait décidé de dissoudre en 2004 l’association créée à la suite de la mort de leur fille, il est important de se souvenir avec reconnaissance de cette femme qui a su transformer le plus terrible deuil en un combat pour la vie mené avec détermination et intelligence durant 18 ans.

 

Cavalière émérite, femme de tête, Christiane Cellier a incarné durant presque 20 ans la lutte contre la barbarie routière et a gagné son combat.

En 1986, à la suite du terrible accident ayant entraîné le décès de leur fille Anne, Christiane et Claude Cellier décidèrent ensemble de mener un combat contre l’indifférence collective et politique face à la mortalité routière. Dès la création de la fondation Anne Cellier en 1987, Christiane Cellier s’est imposée dans chacun des débats ayant trait à la lutte contre la violence routière.

Grâce à sa volonté hors normes, mais aussi à son intelligence et à sa parfaite connaissance des cercles dirigeants, elle a su dénoncer avec efficacité l’insécurité routière, son acceptation collective par la société française, mais également l’inertie inacceptable des pouvoirs publics et politiques. Avec finesse, Christiane Cellier savait évoquer les conséquences les plus tragiques des accidents de la circulation, sans compromis ni sans mansuétude à l’égard des lobbys de l’automobile et de l’alcool.

De la tragique histoire d’Anne, victime innocente du terrorisme routier, Christiane Cellier a su faire un sujet de mobilisation collective. Son action n’était animée ni par la haine ni par la vengeance. Si elle souhaita, avec son mari, que le procès du conducteur responsable de l’accident soit exemplaire, ce n’était ni pour exiger une peine d’une sévérité exceptionnelle, ni pour clouer au pilori le conducteur, mais tout au contraire pour « montrer comment les choses se passent en France, pour que l’on y réfléchisse ». Le combat de Christiane ne fut jamais un combat personnel, mais un combat collectif, avant tout pour les autres. Le visage d’Anne, son calvaire, devait être un gâchis évitable ayant servi à quelque chose.

Sa clairvoyance et sa lucidité l’ont amené à être sollicitée très rapidement par les décideurs politiques qui, dès 1989, la faisaient siéger dans la commission de réflexion sur la lutte contre la vitesse. Cette même volonté farouche permettait d’obtenir deux ans après la mort d’Anne une loi emportant renforcement des sanctions en matière d’accidents de la circulation causée en état d’ébriété. C’est encore l’intelligence avec laquelle son combat fut mené qui la poussa à être consultée lors de l’instauration du permis à points par le Premier ministre Pierre Bérégovoy. C’est encore à elle qui fut consultée dès le début de l’année 2002 par le président candidat Jacques Chirac qui réfléchissait à la décision de faire de la lutte contre la violence routière une priorité nationale.

La voix de Christiane Cellier n’était pas simplement écoutée, elle était également entendue. Chaque décision, chaque mesure prise en matière de sécurité routière dans les années 1990 puis 2000 fut prise après consultation de Christiane Cellier. De la fondation Anne Cellier Christiane avait fait un outil de lobbying efficace pour la sécurité routière.

Dès le milieu des années 1990, rejointe par Jehanne Collard, Christiane put s’appuyer sur une sœur de combat, parfaitement complémentaire et opposée à la fois. Chacune d’elles avait ses méthodes, mais toutes les deux poursuivaient un objectif commun : faire de l’insécurité routière l’ennemi public numéro un et faire de la lutte pour la sécurité routière une priorité nationale.

Peu à peu, la fondation Anne Cellier s’est étoffée. Christiane Cellier s’est alors retrouvée à la tête d’une petite armée de bénévoles, parfaitement déterminés à l’aider dans la poursuite de son combat. Plus qu’une association, la fondation était une famille où chacun avait sa place et son rôle. Quel que soit son histoire, son milieu social, son parcours, chaque membre bénévole jouissait auprès de Christiane de la même écoute. D’une infinie gentillesse et d’une grande affectivité, Christiane savait s’adapter à son interlocuteur et se concentrer sur l’essentiel : l’humanité.

La fondation devint ma famille, et Christiane l’une de ses membres.

C’est en 1995, à l’âge de 12 ans, que j’ai rencontré pour la première fois Christiane Cellier. Je venais de perdre ma mère quelques mois auparavant et mon père avait déjà rejoint les rangs actifs de la fondation. Impressionnante et parfaitement fascinante, Christiane savait se montrer à mon égard d’une très grande bienveillance. Avec Jehanne Collard, elles ont constitué un duo de mentors que je souhaite à chacun de connaître. L’une fut un modèle professionnel et une mère de cœur, l’autre un modèle intellectuel et d’intégrité. De Christiane Cellier j’ai appris l’indispensable nécessité d’un discours tempéré pour faire avancer utilement un débat, tout en veillant à ne jamais renoncer et à ne jamais perdre de vue l’objectif que l’on s’est fixé.

Grâce à Christiane, j’ai eu la chance d’animer durant plus de cinq ans la branche « jeunes » de la fondation Anne Cellier. C’est en effet en 1999, qu’elle m’avait motivé à créer la fondation Anne Cellier junior, considérant que la prévention des jeunes ne pouvait passer que par les jeunes. Ce fut ma meilleure école, la plus riche et la plus passionnante.

À la suite de la dissolution de la fondation en 2004, perdre le lien avec Christiane n’était pas une possibilité envisageable. Nous avons continué à nous voir, à parler de sécurité routière, du combat que je poursuivais au travers de l’association Victimes et Citoyens, de mon avenir professionnel, de ma volonté de devenir avocat, mais aussi de ma vie tout simplement. À chacune des étapes décisives, mais aussi à chaque moment difficile, Christiane savait être là. Écouter sans juger était sa devise. Conseiller et orienter tout en laissant place au libre arbitre et à la réflexion. Christiane Cellier n’était pour moi ni une mère, ni une amie, mais sans doute les deux à la fois.

Entre nous, des liens particuliers se sont tissés au fil du temps, qui ne se sont jamais distendus. Elle fut d’ailleurs l’une des rares à assister à ma prestation de serment en 2013 devant la cour d’appel de Paris.

Les disparitions successives de Jehanne Collard et de Christiane Cellier nous obligent à honorer le message que chacune d’elles a voulu porter : notre goût collectif pour la voiture ne peut à lui seul justifier un bilan humain inacceptable, un gâchis incommensurable, des vies brisées et des familles endeuillées. Surtout, l’observation de leur combat et de la manière dont il fut mené doit nous amener à poursuivre ceux à quoi elles se sont engagées.

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