Pour Maître Vincent Julé-Parade, avocat de victimes spécialisé dans la défense des victimes de la route, la volonté de Volvo et Renault de limiter la vitesse des véhicules à la construction à 180 km/h permet de relancer le débat notre conception de l’automobile et notre rapport à la vitesse. Mais il faut aller plus loin et la technologie permet dès à présent de le faire.
À l’instar du constructeur Volvo, Renault vient d’annoncer sa volonté de limiter la vitesse de ses véhicules à la construction à 180 km/h. Cette mesure, bien que courageuse, apparaît davantage symbolique. En effet, la réalité de l’insécurité routière montre que si la vitesse demeure la première cause d’accident, les excès de vitesse à l’origine des décès et des blessures ne seront pas endigués par une imitation à 180 km/h. Pour Maître Vincent Julé-Parade, avocat spécialisé dans la défense des victimes de la route, la décision prise par Renault a le mérite de relancer le débat sur l’utilité des véhicules à la puissance démesurée.
« Chaque jour dans mon cabinet, je vois défiler les dossiers dans lesquels des familles entières ont été pulvérisées dans des accidents de la circulation causée par la vitesse excessive. Je plaidais encore la semaine dernière devant le tribunal correctionnel du Mans, défendant une famille ayant perdu leur père ou leur mari par la faute d’un individu qui roulait à plus de 150 km/h sur une route limitée à 90 km/h. À chaque fois, la même question se pose : pourquoi autoriser des moteurs aussi puissants ?
Bien avant de devenir avocat des victimes de la route, j’ai animé des associations de lutte contre l’insécurité routière. J’ai participé à de nombreux travaux, y compris ceux du Conseil national de la sécurité routière, relatif à la lutte contre la vitesse, première cause de mortalité sur nos routes. La question de la limitation de la vitesse à la construction apparaît comme un serpent de mer de la sécurité routière. Il y a une quinzaine d’années déjà, des associations et des scientifiques, à l’instar du professeur Claude Got, militaient pour une limitation à la construction à 130 km/h, vitesse maximale autorisée sur nos routes.
La question de la limitation à la construction a été remise sur le devant de la scène par les constructeurs eux-mêmes.
L’an dernier, Volvo, pionnier incontestable en matière de technologie embarquée et créateur de la ceinture trois points, annonçait que l’ensemble des véhicules produits à partir de 2020 verrait leur vitesse maximale bridée à 180 km/h.
Aujourd’hui, cette décision est annoncée par Renault. Cette prise de position de la part de deux constructeurs est particulièrement courageuse, surtout dans un contexte économique compliqué. Elle s’inscrit avant tout comme voulant révolutionner notre conception de l’automobile et notre rapport à la vitesse.
Certes, une limitation à 180 km/h n’empêchera pas les excès du quotidien à l’origine de nos morts et de nos blessés graves. Cependant, je reste convaincu que ce parti pris de deux constructeurs automobiles traduit une volonté de mettre un terme à la course effrénée à la vitesse, à la puissance, et suscite le débat sur la conception même de la voiture.
J’ose espérer que l’on ne s’arrêtera pas là. Aujourd’hui, la technologie nous permettrait d’envisager un bridage électronique de la vitesse en fonction de la limitation applicable à chaque type de réseau. Les lecteurs intelligents de signalisation permettent déjà, chez certains constructeurs, d’activer volontairement le limitateur de vitesse adaptée. Il est incontestable que la réelle avancée sera de rendre obligatoire et non déverrouillable ce dispositif.
Les impératifs tant écologiques que sociétaux imposent de remettre l’automobile à la place qui doit être la sienne, c’est-à-dire un outil de mobilité respectueux de notre société et des autres usagers.
Espérons que cette décision courageuse de Volvo et de Renault permettra de remettre en cause notre rapport à la vitesse et à ses vertus. »