C’est un chiffre qui fait peur. Un patient sur vingt contracte une infection nosocomiale dans l'établissement où il est hospitalisé. Longtemps mal pris en compte par le droit, l’indemnisation des victimes d’infections nosocomiales a été largement améliorée par la Loi Kouchner du 4 mars 2004. Il n’en reste pas moins qu’il n’est pas toujours aisé de faire valoir ses droits en cas d’infection nosocomiale.
Quelle procédure engager si l’on est victime d’une infection nosocomiale ? Quelles preuves apporter ?
Me Vincent Julé-Parade, avocat spécialisé en droit des victimes, répond à nos questions.
Les infections nosocomiales restent l’une des préoccupations majeures du corps médical et l’une des grandes craintes des patients. Et pour cause : selon l’enquête nationale de prévalence des infections nosocomiales et des traitements anti-infectieux en établissement de santé (ENP) réalisée en 2017, un patient hospitalisé sur vingt est touché par au moins une infection nosocomiale lors de son séjour en établissement de santé, qu’il soit public ou privé. Si aucun chiffre précis n’est connu, il est aujourd’hui estimé que plus de 4 200 décès seraient liés à des infections nosocomiales chaque année. Un chiffre inquiétant.
Qu’est-ce qu’une infection nosocomiale ?
Les infections nosocomiales sont fréquemment constatées dans les services de réanimation (un patient infecté sur quatre), où sont soignés les patients les plus vulnérables et exposés à des dispositifs invasifs (cathéter, assistance respiratoire, sonde urinaire).
Une infection nosocomiale désigne une infection contractée au sein d’un établissement de santé qu’il s’agisse d’un hôpital, d’une clinique, mais aussi d’un cabinet libéral, à la suite d’un soin.
Les germes à l’origine des infections nosocomiales les plus fréquemment impliqués sont les bactéries E.coli (25 %), le Staphylocoque doré (19 %) et le bacille pyocyanique (10 %).
Deux catégories d’infections nosocomiales peuvent être distinguées :
- les infections à caractère endogène, c’est-à-dire qui ont pour origine une contamination par les propres germes du patient (par exemple lors d’une intervention)
- les infections à caractère exogène, c’est-à-dire extérieur au patient, les germes provenant des autres patients, du personnel ou de l’environnement extérieur (instruments…).
On considère habituellement que l’infection nosocomiale se déclare plus de 48 heures après l’admission du patient dans l’établissement de santé. Dans le cas d’un délai inférieur, l’infection est réputée avoir été contractée avant l’arrivée du patient à l’hôpital : il est alors considéré qu’elle était déjà en incubation à son arrivée.
« C'est un des drames des hôpitaux : il arrive qu'au lieu de nous guérir, ils nous rendent malade... parfois avec des conséquences dramatiques, allant d’un handicap lourd jusqu’au décès du patient » précise Maître Vincent Julé-Parade.
Une jurisprudence plus favorable aux victimes
Jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi du 4 mars 2002 , dite loi Kouchner, relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, il appartenait aux victimes d’établir la preuve d’une faute de l’établissement ou du professionnel de santé. Or, celle-ci étant compliquée à rapporter, il était très difficile pour elles d’engager des poursuites judiciaires.
La loi du 4 mars 2002 est venue simplifier l’indemnisation des victimes d’infections nosocomiales.
L’article L. 1142-1 I alinéa 2 du Code de la santé publique dispose que « les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d’infections nosocomiales, sauf s’ils rapportent la preuve d’une cause étrangère ».
Le principe est donc la présomption de responsabilité des établissements de santé en matière d’infection nosocomiale, la responsabilité de l’établissement de santé étant engagée de plein droit et ce dernier ne peut pas s’exonérer de sa responsabilité même s’il prouve qu’il n’a pas commis de faute. Sauf, précise Maître Vincent Julé-Parade, "en cas de force majeure, c’est-à-dire due à une cause étrangère, qui est extérieure, imprévisible et irrésistible. Dans les faits, cela est difficile à rapporter. En cas de cause extérieure par exemple, il lui faudra prouver que toute personne étant porteuse de germes, le patient s’est auto-contaminé".
L’indemnisation des infections graves par la solidarité nationale
La loi du 4 mars 2002 a instauré le principe de l’indemnisation des victimes d’accidents médicaux par la solidarité nationale pour les actes accomplis postérieurement au 5 septembre 2001.
Lorsque les conditions strictement définies par le texte se trouvent satisfaites, l’indemnisation du patient victime sera supportée par l’Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux (ONIAM).
Les conditions d’indemnisation par l’ONIAM sont :
- Une incapacité permanente de plus de 24%
- Un arrêt de travail de plus de 6 mois au cours de l’année suivant l’infection
- Un déficit fonctionnel temporaire de plus de 50% durant 6 mois au cours de l’année suivant l’infection
- Exceptionnellement, lorsqu’aucun de ces trois critères n’est satisfait, la victime peut bénéficier du règlement amiable si elle remplit un des deux critères dits exceptionnels que sont l’inaptitude professionnelle ou l’existence de troubles particulièrement graves dans les conditions d’existence.
Quelques conseils pour obtenir réparation
Afin d’espérer une indemnisation, Maître Vincent Julé-Parade délivre quelques conseils :
- Obtenir la copie intégrale de son dossier médical. "Cela comprend les comptes-rendus d’hospitalisation, opératoires, d’examens, ainsi que l’ensemble des fiches de suivi. C’est très important car c’est par rapport aux prélèvements biologiques, ou encore par rapport à la courbe de température que l’on va pouvoir fixer une date de contamination." Précise Me Julé-Parade.
- Se rapprocher d’une association ou d’un avocat spécialisé dans la défense des victimes d’erreurs médicales qui pourra aider le patient à s’orienter dans ses démarches. "Il faut ensuite tenter d’obtenir réparation : cela va passer par une expertise. Un expert va devoir se prononcer sur la date et l’origine de l’infection nosocomiale, ainsi que sur ses conséquences. À partir de tous ces éléments, va s’imposer au centre de soins une obligation indemnitaire ou non."
- Se constituer un dossier complet en gardant tous les justificatifs. En effet, au nom du principe de la réparation intégrale, le responsable du préjudice doit indemniser tout le dommage et uniquement le dommage, sans qu’il en résulte ni appauvrissement, ni enrichissement de la victime. Or, insiste Me Julé-Parade, "les gens ne pensent pas toujours à garder tous les justificatifs des frais de santé divers qu’ils ont engagés suite à l’infection : des soins extérieurs à l’hôpital qui n’ont pas été pris totalement en charge, mais aussi les frais de déplacement, les arrêts de travail… D’où l’importance de conserver tous ces justificatifs."
- Demeurer vigilant sur les termes de l’expertise quant aux conclusions, ainsi qu’au montant proposé par l’assureur, l’hôpital ou l’ONIAM est bien conforme à ce que la jurisprudence alloue.
Ce qu’il faut retenir
- Chaque année, plus de 4.000 patients décéderaient des suites d’infections nosocomiales
- Il existe une responsabilité de plein droit des établissements de soins en cas d’infection survenue au cours de l’hospitalisation
- En cas d’infection nosocomiales entrainant de lourdes conséquences, l’indemnisation sera assumée par l’ONIAM au titre de la solidarité nationale
- Le recours a un avocat spécialisé en droit médical et dans la défense des victimes d’accidents médicaux peut être utile et précieux.
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Le Cabinet de Maître Vincent Julé-Parade est spécialisé en Droit des Victimes. Basé à Paris, notre Cabinet intervient exclusivement aux côtés des victimes d’accidents de la route, d’erreurs médicales, d’agression, d’attentats et ce dans la France entière y compris en Outre-Mer (Martinique, Guadeloupe, Guyane, Réunion, Nouvelle Calédonie et Polynésie). Grâce à nos partenaires et correspondant, notre cabinet d’avocat vous garantit un panel de compétences utiles dans le suivie d’une procédure d’indemnisation, y compris un suivi par une assistante sociale.